A petaouchnoc

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Approvisionnements


Approvisionnement

 

Il est bien positif que sans de bonnes matières premières le plus grand cuisinier du monde ne vous fera jamais rien de bon.

C'est pourquoi on ne saurait apporter trop de soin à faire son marché; ce fait représente à lui seul toute une science, basée avant tout, comme la plupart des branches de la cuisine, sur l'expérience et la longue pratique.

 

Je dois me borner, quant à présent, à donner certaines notions générales sur les approvisionnements, l'art de les choisir et de les acheter. J'aurai à revenir plus en détail sur les caractères extérieurs des viandes, des poissons, des gibiers, des légumes, lorsque je traiterai chacun de ces chapitres en particulier.

 

Toutefois je dirai comme point de départ et comme première règle de conduite aux acheteurs encore novices qui ont à s'approvisionner dans les halles et marchés :

 

Assurez-vous d'abord du cours des denrées pour toutes vos acquisitions, ce qui vous sera toujours facile en interrogeant plusieurs étalages avant de vous décider à acheter définitivement.

 

N'ayez jamais de marchand précisément attitré; ne donnez votre confiance à personne d'une façon absolue ; rapportez-vous-en bien plutôt à votre discernement et à votre propre examen qu'aux paroles du marchand, même le plus digne de foi.

 

Lorsqu'une pièce vous est recommandée avec une insistance particulière, tenez-vous doublement sur vos gardes : il est bien peu d'industriels qui résistent à la tentation d'écouler quand même le poisson, le gibier, la viande d'une fraîcheur douteuse.

 

Soyez convenable et poli avec tous les marchands, mais sans jamais vous lier précisément avec aucun d'eux. Il est bien rare que le trop d'intimité n'engendre pas à la longue certains abus, qui sont toujours au préjudice de l'acheteur.

 

Voici certaines indications élémentaires dont on fera bien de se pénétrer profondément pour le choix des denrées :

 

VIANDE DE BOUCHERIE.

 

Pour le bœuf, attachez-vous à une viande d'un ton amarante très vif; que la graisse soit d'un jaune très clair, rappelant la nuance du beurre très fin ; qu'elle soit dure et résistante sous le doigt; la graisse molle, peu abondante; la teinte brune et la teinte livide sont les indices infaillibles d'un bœuf de qualité inférieure.

 

Nous donnons, comme complément d'indication pour la viande de bœuf, le rognon de bœuf de bonne et de mauvaise qualité. 

 

Pour le veau, choisissez toujours la chair bien blanche ; que la graisse soit également très blanche et bien transparente. 

 

Évitez surtout le veau qui se trouve privé de graisse, dont la chair offrirait une teinte d'un rouge livide, et celui dont le rognon serait enveloppé d'une graisse rougeâtre.

 

Le bon mouton offre les mêmes indices que le bon bœuf : la graisse doit être très blanche et non jaune et la chair livide et terne.

 

VOLAILLE.

 

Pour la volaille, s'attacher avant tout à la tendresse, dont il faut s'assurer avec un soin extrême, surtout dans ce que nous

appelons la fin de saison, c'est-à dire du 1" décembre au 1" mai.

 

Les poulets nouveaux arrivent en mai; c'est donc l'époque la plus favorable, ce qui n'empêche pas qu'il faille examiner toujours avec le même soin la bête que l'on veut acheter.

 

Vous reconnaîtrez le poulet tendre à la grosseur des pattes et à celle du cou. Une volaille jeune a toujours les pattes grosses et les genoux très gros: ces grosseurs caractéristiques, justement prisées des amateurs, disparaissent avec l'âge.

 

Un poulet dur a les pattes minces et le cou maigre ; la chair du gros de la cuisse offre une teinte légèrement violacée.

 

Après avoir examiné les signes extérieurs, on doit pincer le gros de l'aileron et la pointe du brechet: si la chair est flexible à ces deux endroits, vous pouvez employer le poulet en toute confiance.

 

JAMAIS DE VIEILLES VOLAILLES !

 

J'appelle à dessein l'attention de tous sur ce principe que j'établis comme une des grandes lois de la cuisine.

 

Jamais en cuisine de vieilles volailles, avec lesquelles il n'y a rien de bon à faire, de quelque façon qu'on s'y prenne.

 

C'est une grosse erreur que de déclarer, comme il est dit dans plus d'un traité de cuisine, que l'on doit mettre une vieille poule dans le pot-au-feu. Loin d'améliorer le bouillon, la vieille poule ne peut que lui nuire en lui communiquant une mauvaise odeur de poulailler.

 

C'est également une erreur de croire que l'on peut arriver à faire une bonne daube avec une vieille oie ou une vieille dinde : on n'obtiendra qu'un mauvais résultat.

 

Toutefois on ne doit pas confondre la volaille ferme naturellement, mais jeune, avec la volaille dure pour cause de vieillesse.

On peut encore tirer parti de la volaille ferme et jeune en usant de certains procédés que nous indiquerons au chapitre spécial de la volaille ; mais avec les vieilles bêtes dures, je le répète avec l'assurance d'une conviction profonde, rien, absolument rien de bon à faire.

 

Vous reconnaîtrez une bonne dinde à la blancheur de la graisse et de la chair. Gardez-vous de celles qui ont de longs poils et la chair des cuisses et du sot-l'y-laisse d'une teinte violacée.

 

Pour choisir l'oie, on pince l'aileron et on brise la partie inférieure du bec ; il faut que le bec se casse très facilement, et que la graisse soit d'une teinte pâle et tout à fait transparente.

 

On choisira le canard d'après les mêmes indices.

 

Pour le pigeon, il faut que la chair des filets soit d'un rouge très clair.

 

Lorsque le pigeon vieillit, le filet devient d'une teinte noire violacée ; la patte s'amincit considérablement.

 

POISSON.

 

On reconnaît un poisson frais à la rougeur des ouïes, au brillant de l'œil et à la fermeté des chairs.

 

L'odeur ne suffit pas pour constater la fraîcheur ou la qualité d'un poisson; il peut être ce que nous appelons usé sur la glace, sans avoir pour cela de mauvaise odeur appréciable ; sa chair, dans ce cas-là, est terne et molle, et il faut bien se garder de l'employer.

 

On n'oubliera pas que tous les poissons perdent de leur qualité au moment du frai. C'est aussi là un fait essentiel dont on doit tenir compte dans les acquisitions.

 

Ce que j'ai dit pour les vieilles volailles s'applique encore plus directement aux vieux poissons, qui ne doivent, sous aucun prétexte, paraître sur une table.

 

GIBIER.

 

On évitera toujours les vieux lièvres, dont on ne peut jamais tirer qu'un mauvais parti en cuisine. On n'achètera donc jamais que des levrauts et des trois quarts. On reconnaît un lièvre tendre lorsque la patte de devant se casse facilement, lorsque les genoux sont gros, le cou court et ramassé.

 

Les bons lapins de garenne se reconnaissent aux mêmes signes.

 

Pour le faisan, l'ergot doit être prononcé; on pince l'aileron pour reconnaître si la chair est flexible.

 

On pince également l'aileron et le brechet de la bécasse pour reconnaître si la bête est tendre.

 

Mêmes signes pour le canard sauvage, le pilet, les appelants, la poule d'eau, la sarcelle, le rouge de rivière.

 

Mêmes signes pour les perdreaux; on s'assurera de l'âge d'après l'aspect des grandes plumes : les vieux perdreaux ont la plume ronde ; elle est pointue chez les jeunes.

 

LÉGUMES.

 

Le premier point à observer pour l'acquisition des légumes est de se tenir bien au courant des variations que chaque espèce de légume subit comme goût et comme aspect, en raison des diverses époques de l'année.

 

Je demande que l'on prenne soigneusement note de ce fait important, quant au choix des légumes; ils subissent souvent de très grandes différences, suivant les saisons: la carotte du printemps, par exemple, est fort loin de ressembler, comme goût et qualité, à la carotte d'automne et d'hiver.

 

Je donnerai, en parlant de chaque légume en particulier, les indices les plus précis pour faire connaître leurs bonnes et leurs mauvaises saisons, et les employer en conséquence.

 

ÉPICERIE. — FRUITERIE.

 

Quant aux articles concernant l'épicerie, la fruiterie, la crémerie, beurre, crème, huile, vinaigre, sucre, pâtes, etc., je recommande plus que jamais, comme principe invariable, d'acheter toujours dans les premières qualités ; on y trouvera à la fois satisfaction et économie.

 

Une huile de qualité inférieure que vous introduirez dans une sauce ne peut que vous la gâter ; de même pour le beurre, qu'il est toujours si important d'avoir de première fraîcheur et de premier choix.

 

Une petite quantité de vrai beurre riche en arôme vous donnera quelque chose de bon, et ajoutera à la qualité de ce que vous avez à servir, tandis qu'avec le mauvais beurre vous obtenez un résultat tout contraire : plus vous le prodiguez, plus vous gâtez ce que vous apprêtez.

 

Règle invariable, n'achetez jamais de beurre sans l'avoir soigneusement flairé, puis goûté à la pointe du couteau du marchand : ces deux épreuves préalables sont tout à fait essentielles. Si vous n'êtes pas absolument satisfait de la fraîcheur, soyez impitoyable : n'achetez pas, allez ailleurs. On ne saurait trop se pénétrer de cet axiome : « Pas de cuisine possible avec du beurre douteux. »

 

N'employez non plus jamais d'œufs sans les avoir bien examinés, non pas seulement en les achetant, mais aussi une fois cassés.

Un œuf peut être parfaitement clair à l'œil et avoir un goût de paille, ce qui suffit pour gâter tout un mets. Vous devez casser vos œufs l'un après l'autre, et ne les verser dans la terrine que lorsque vous vous serez assuré de leur goût.

 

La question du lard est aussi très importante, et on doit bien se garder de la négliger : choisissez votre lard toujours bien blanc, le moins nerveux possible, et qu'il n'ait jamais de goût de rance ni d'évent.

 

Le porc frais doit avoir la chair légèrement teintée de rouge, et jamais marbrée.

 

POIDS DES LÉGUMES

POUR GARNITURE DE POT-AU-FEU.

 

 

Une carotte de moyenne grosseur pèse 150 grammes.

Un oignon moyen, 100 grammes.

Un poireau épluché, 35 grammes.

Une moyenne branche de céleri, 35 grammes.

Une grosse échalote, 10 grammes.

Une gousse d'ail, 7 grammes.

 

Il est bon de s'habituer à apprécier de l'œil, autant que possible, les poids de ces divers légumes, comme de tous les objets d'un emploi usuel, pour n'avoir pas à recourir à tout instant à la balance.

 

 

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18/07/2018
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